top of page

"INVINCIBLE" Par B Dayton

  • Ryann
  • 21 juin
  • 3 min de lecture

Dans le monde saturé de la pop moderne, où l’esthétique prend souvent le pas sur la sincérité, “Invisible”, le tout premier single de B Dayton, se démarque comme un rare équilibre entre franchise émotionnelle et grandeur sonore. Extrait de son EP à paraître At The End of the Day (prévu pour le 3 octobre), ce morceau est une méditation personnelle poignante sur le deuil, l’identité et la douleur silencieuse de se sentir invisible – non seulement aux yeux du monde, mais aussi de ses proches, et plus tragiquement encore, de soi-même. Porté par des synthés brillants et des rythmes entraînants, “Invisible” est à la fois un hymne pop et une confession intime. Rappelant des artistes comme MUNA, Troye Sivan ou Tove Lo, Dayton entre dans le paysage de la pop queer alternative avec une voix unique : tendre, affirmée et résolument ancrée dans l’émotion.


Sur le plan sonore, “Invisible” est une véritable leçon d’atmosphère. Le morceau s’ouvre sur un voile de synthétiseurs – doux, cinématographiques – qui évoque instantanément une esthétique nocturne, presque urbaine, baignée de néons. Il y a une forme d’évasion nocturne intégrée à la production, quelque chose qui traduit parfaitement la liberté mélancolique de rouler seul·e, fenêtres baissées, à la recherche d’un apaisement mental. Le rythme, soutenu par une pulsation électronique régulière, évoque les grands moments de Robyn, tout en conservant une sobriété émotionnelle propre à Dayton. Là où Robyn danse sur les cendres du cœur brisé, Dayton, lui, plonge dans la fragilité. Sa voix – juvénile mais assurée – survole la production avec une urgence contenue. Jamais noyé par l’instrumentation, il en fait un véritable canevas émotionnel sur lequel viennent s’inscrire ses paroles, telles des touches de lumière dans l’obscurité.


C’est justement dans ces paroles que “Invisible” touche en plein cœur. Des lignes comme « Tu ne m’as jamais vraiment vu / J’étais juste ton ombre dans la lumière » ou encore « Je t’ai regardé disparaître en essayant de rester lumineux » ne sont pas de simples constats de solitude ou d’abandon – ce sont des fragments d’une mémoire affective complexe, marquée par le deuil. La perte de son père, emporté par l’addiction, agit ici comme une révélation douloureuse : parfois, on ne voit jamais vraiment ceux qu’on aime. Dayton ne s’attarde pas sur une tristesse évidente ; il explore des émotions bien plus subtiles – la culpabilité de ne pas avoir compris, la souffrance de se sentir invisible dans sa propre famille, et la contradiction entre empathie et autoprotection. Rares sont les chansons pop qui abordent ces thèmes avec autant de finesse et de retenue.


Ce qui frappe dans “Invisible”, c’est sa dualité. D’un côté, il s’agit d’un morceau entraînant, au refrain accrocheur et euphorique ; de l’autre, il regorge de mines émotionnelles. À chaque écoute, une nouvelle couche de vulnérabilité se dévoile. Cet équilibre entre puissance mélodique et introspection profonde place Dayton dans cette nouvelle génération d’artistes pop queer qui redéfinissent la vulnérabilité dans la musique populaire. Si des figures comme MUNA ou Troye Sivan ont ouvert la voie, Dayton poursuit ce travail avec une intimité encore plus brute, presque diaristique. Il ne se contente pas de chanter la douleur – il nous guide à travers elle, avec douceur et lucidité, comme quelqu’un qui l’a vécue et traversée.



La production, bien que riche et cinématographique, ne prend jamais le dessus sur l’émotion. Au contraire, sa sophistication réside dans sa subtilité. Les couches de synthés deviennent de plus en plus complexes à mesure que la chanson avance, traduisant la tension émotionnelle croissante. On sent une forme de libération dans le dernier refrain – pas seulement musicale, mais presque spirituelle – comme si Dayton expirait enfin tout ce qu’il avait gardé en lui. Le morceau ne se termine pas avec une résolution classique ; il n’y a ni happy end, ni morale. Et c’est précisément ce qui le rend si touchant. Le deuil n’a pas de conclusion nette. Il persiste, évolue, enseigne. Et “Invisible” honore cette vérité avec grâce et clarté.


“Invisible” n’est pas seulement un premier single solide – c’est une véritable déclaration artistique. B Dayton ne se présente pas simplement comme un chanteur ou un compositeur, mais comme un conteur capable de saisir les nuances de l’expérience queer, du traumatisme familial et de la quête de soi. Il transforme sa douleur en quelque chose de partagé, presque communautaire, invitant chacun·e à se reconnaître dans ses mots, ses silences et ses mélodies. Avec sa production soignée, son lyrisme sincère et son arc émotionnel puissamment maîtrisé, “Invisible” annonce un EP très prometteur. Si ce premier extrait en est l’indicateur, At The End of the Day ne sera pas seulement un recueil de chansons – ce sera un miroir, un baume, et un journal sonore aussi intime que libérateur.



Ècrit par Ryann

 
 
 

Comments


bottom of page