"CHEAP JAPANESE BASS" Par Steve Lieberman
- Ryann
- il y a 4 jours
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Avec la sortie de “Cheap Japanese Bass”, Steve Lieberman, figure légendaire de l’underground connue pour sa fusion brute et sans compromis de punk, de bruit et de sensibilité marginale, ouvre un nouveau chapitre marquant dans une discographie qui compte désormais 85 albums. Ce morceau n’est pas simplement une nouvelle entrée dans son catalogue : c’est une déclaration autobiographique enflammée. En tant que premier single de son dernier opus, “Cheap Japanese Bass” marque une étape importante dans la longue croisade de Lieberman, qui canalise depuis des décennies le chaos, la vulnérabilité et la rébellion dans un univers sonore unique qu’il nomme militia punk.
Dès les premières secondes, le morceau assaille l’auditeur avec un mur de distorsion et un rythme primal, évoquant l’esprit DIY du punk originel tout en transgressant les conventions du genre avec une audace totale. Le titre est à la fois littéral et métaphorique : une référence directe aux débuts de Lieberman comme bassiste et chanteur dans les années 70, et un symbole de son rejet obstiné du vernis et des faux-semblants de l’industrie musicale. Cette “basse japonaise bon marché” devient une relique sacrée, chargée de rébellion, de persévérance et d’identité.
Ce qui rend “Cheap Japanese Bass” remarquable, ce n’est pas seulement son regard vers le passé, mais sa manière de transformer ce souvenir en une énergie brute et immédiate. Ce n’est pas une nostalgie passive ; c’est une résurrection enflammée. Le chant de Lieberman est un mélange viscéral de cris, de grognements et de paroles lancées comme un flot de conscience. Il ne cherche pas la mélodie, mais l’urgence et la conviction. Ses textes oscillent entre autobiographie et manifeste, refusant toute forme de polissage pour privilégier la vérité émotionnelle. Son mépris pour la musique trop produite et aseptisée est palpable. À la place, il offre quelque chose de plus essentiel : le chaos, la rugosité, et l’honnêteté.
Le morceau est une prouesse orchestrale chaotique. Lieberman aurait joué 25 instruments différents, et loin de produire un ensemble surchargé ou incohérent, cela se traduit par une densité sonore impressionnante. Les guitares saturées croisent des lignes de flûte improbables, les percussions mécaniques martèlent des grooves de basse punk, et les décharges de bruit électrisent les marges. Ce n’est pas de la musique “belle” — c’est de la musique qui provoque. Les arrangements sont bruts, tranchants, volontairement désordonnés, mais chaque élément semble avoir une intention précise. Même dans ses moments les plus dissonants, la chanson maintient une tension étrange, comme si elle défiait l’auditeur de détourner le regard.
Ce n’est pas une musique pour tout le monde — et c’est bien là l’objectif. Lieberman a toujours évolué en marge, non seulement sur le plan sonore, mais aussi dans sa vision artistique. À 66 ans, il reste un créateur radical, incarnant l’artiste outsider jusqu’au bout. “Cheap Japanese Bass” est une preuve de longévité, non pas dans la sagesse paisible, mais dans une insoumission toujours plus revendiquée. C’est à la fois une célébration et un cri de rage : célébration d’un engagement total envers la musique, et plainte contre l’effacement culturel des artistes qui refusent de se plier.
Et pourtant, il y a quelque chose d’inspirant dans cette obstination. Lieberman ne cherche ni à plaire aux algorithmes ni à suivre les tendances. Il documente une vie façonnée par les amplis et la distorsion, trouvant dans le vacarme une forme de salut personnel. C’est là tout le paradoxe de son œuvre : sous la rugosité, il y a une profonde sensibilité, celle d’un homme qui a construit son identité à travers un langage que beaucoup considèrent comme du bruit.
“Cheap Japanese Bass” est plus qu’un morceau — c’est un cri de guerre contre la médiocrité, la nostalgie passive, et l’effacement de l’âme brute du punk. Pour les fans de longue date, c’est une nouvelle pierre angulaire dans le parcours d’un artiste hors normes. Pour les néophytes, c’est une initiation brute mais nécessaire à l’une des voix les plus singulières et intransigeantes de ces cinquante dernières années. Que l’on soit attiré par l’énergie, l’histoire ou simplement la provocation, une chose est sûre : “Cheap Japanese Bass” de Steve Lieberman est un cri qui exige qu’on l’écoute — même si ça fait saigner les oreilles.
Ècrit par Ryann
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