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"PINES SALAD" Par ReeToxA

  • Ryann
  • il y a 7 jours
  • 3 min de lecture


À l’ère des hits instantanés et du streaming à outrance, "Pines Salad," le premier album de Jason McKee sous le nom de ReeToxA, est un détour bienvenu, à la fois réfléchi et sincère. Composé de 14 titres, sélectionnés parmi plus de 30 ans d’écriture, cet album ressemble à un carnet de confidences – brut, authentique et profondément humain. McKee livre un disque qui marie les angles rugueux du rock alternatif à des paroles d’une honnêteté déconcertante, le tout imprégné de la sensibilité d’un homme qui a vécu les histoires qu’il chante. Si "Pines Salad" était une mixtape échangée entre amis dans les années 90, elle serait cornée, usée, et trop précieuse pour être prêtée à qui que ce soit.


Ce qui frappe dès la première écoute, c’est la dualité sonore de l’album : il est à la fois empreint de nostalgie et résolument actuel. Sur le plan sonore, McKee construit des ponts entre l’esthétique grunge lourde en riffs des années 90 et la clarté mélodique du rock indépendant contemporain. Par moments, on sent l’ombre de Pearl Jam ou de Soundgarden planer sur les arrangements et la voix rauque de McKee. Mais ces influences vintage sont équilibrées par une sensibilité plus moderne, plus vulnérable – une touche qui rapproche ReeToxA d’artistes comme Phoebe Bridgers ou même Olivia Rodrigo. "Pines Salad" ne semble jamais figé dans le passé ; il ressemble plutôt à une vieille âme qui discute avec le présent.


Si l’instrumentation est riche et texturée – grâce à un line-up impressionnant de musiciens australiens comme Kit Riley, James Ryan et Peter Marin – c’est la plume de McKee qui donne sa véritable force à l’ensemble. Ses textes sont souvent douloureusement lucides, traversés par le deuil, l’errance identitaire et les maladresses sentimentales. Des morceaux comme Amber et Slipstream explorent le sentiment d’inadéquation avec un sens aigu de la métaphore. Dans Amber, il chante : « Je me sens comme un âne dans un concours de pur-sang », une phrase à la fois autodérisoire et touchante. On ne se contente pas d’écouter les tourments de McKee – on les partage. Et c’est là la plus grande réussite de Pines Salad : sa capacité à rendre la vulnérabilité universelle.


L’album regorge de petites surprises. Slipstream commence comme une ballade intime avant de s’épanouir dans un refrain cinématographique digne d’une bande originale. Catherine Wheel flirte avec l’énergie du post-punk avant de s’évanouir dans une ambiance plus onirique, tandis que "No Warmth" joue sur les silences et les contrastes, prouvant que parfois, le murmure est plus puissant que le cri. On sent ici un véritable travail d’artisan, où la cohésion du groupe permet à l’écriture de McKee de respirer sans jamais se perdre. La production signée Simon Moro est sobre et maîtrisée : claire sans être aseptisée, aérienne sans perdre en intensité. Aucun effet superflu – juste de la retenue, de la finesse, et une foi absolue dans la force des chansons.



Puis vient "Bobbie," le premier single et cœur émotionnel de l’album. Inspiré par la perte de sa mère alors qu’il était en prison, le morceau est poignant de sincérité. Il s’ouvre sur une instrumentation épurée, laissant la place au récit, avant de s’élever dans un refrain cathartique. Il n’y a ici ni pathos ni exagération – juste une vérité brute, douloureusement belle. Un choix audacieux pour lancer un album, mais parfaitement cohérent avec l’univers de "Pines Salad". "Bobbie" est une porte d’entrée directe dans l’intimité de McKee – et une fois entré, on a envie de rester.



Ce qui rend "Pines Salad" si captivant, c’est l’équilibre entre professionnalisme et imperfection assumée. Ce n’est pas un disque de refrains formatés ou de productions clinquantes. C’est un album vécu, façonné dans la durée. McKee ne prétend pas avoir toutes les réponses – il chante comme quelqu’un qui est encore en train de fouiller les décombres de son passé. Cette honnêteté, alliée à des arrangements solides et une interprétation sans faille, donne naissance à un premier album qui ne sonne pas comme un début, mais comme l’aboutissement d’un long parcours. "Pines Salad" est peut-être le premier disque officiel de ReeToxA, mais il résonne comme l’œuvre d’un artiste qui a toujours été là – et qui a enfin décidé de se montrer au grand jour.



Ècrit par Ryann

 
 
 

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